L’idée qu’il n’y a pas d’entretien à faire sur les véhicules électriques est un mythe.
Le phénomène du véhicule électrique est encore anecdotique, mais il ne fait aucun doute qu’il prend de l’ampleur.
Et avec la volonté gouvernementale de vouloir éliminer les véhicules à carburant en 2035, le marché secondaire doit se positionner.
« Ce n’est pas en 2035 qu’on va devoir s’y mettre, mais plutôt dès maintenant, annonce Yves Racette, responsable du pôle d’expertise en véhicules électriques au CPCPA. Avec la pression ajoutée par les constructeurs non conventionnels qui veulent se tailler une place sur ce marché, la transition va se faire beaucoup plus rapidement. Même les constructeurs bien établis annoncent le lancement de plus de véhicules électriques qu’à essence pour les prochaines années. »
Les spécialistes consultés pour cet article s’entendent toutefois sur le fait qu’hybrides ou électriques, les nouvelles évolutions de l’automobile n’ont rien pour alarmer les garagistes de notre marché.
« Pour le diagnostic, il y a une nouvelle approche, explique M. Racette, ce ne sont plus les mêmes codes. Il y a un niveau supérieur d’intercommunication entre les systèmes. Il y a de la haute tension, mais c’est encore un véhicule avec plusieurs pièces semblables à celles que l’on retrouve sur une voiture à essence. »
À la tête du programme de formation Compétences VE, M. Racette milite pour la formation avant de toucher un véhicule électrique.
Pour la sécurité des techniciens, mais aussi pour éviter qu’un client revienne à cause d’une mauvaise intervention sur son véhicule.
« Formation, formation, formation, appuie Wilson Almeida, formateur aguerri de l’Académie Vast-Auto. Il y a un certain niveau de complexité au diagnostic sur ces véhicules, surtout pour les hybrides qui combinent deux systèmes. »
Mais le diagnostic, il l’enseigne et le pratique avec un analyseur du marché secondaire.
C’est aussi l’approche de Steve Oborne, garagiste à Windsor.
Il préconise aussi la formation de Compétences VE pour bien maîtriser le travail sécuritaire sur ces véhicules.
« Mais il faut démystifier le diagnostic des véhicules électriques. Ce n’est pas un vaisseau spatial. Quand on pense qu’il faut de huit à dix capteurs pour gérer un moteur à essence comparativement à un pour un moteur électrique on voit que l’entretien du VÉ est beaucoup plus simple. »
Des travaux à facturer
On peut aussi remettre en question le mythe voulant que les voitures 100 % électriques n’aient pour ainsi dire pas besoin d’entretien.
« On estime que 65 % des pièces vendues dans le marché secondaire vont sous l’auto. Ce qu’on perd avec l’électrique, c’est le changement d’huile, qu’on fait souvent à perte pour attirer la clientèle et vendre d’autres entretiens. Donc, le VÉ va aussi nécessiter le remplacement des freins, des pièces de suspension et de direction, poursuit M. Oborne. Ce sont des pièces qui sont particulièrement sollicitées à cause de poids supplémentaire du véhicule. »
Le véhicule électrique présente aussi des particularités qui en rendent l’entretien intéressant pour le garagiste généraliste.
Par exemple, le VÉ peut compter trois systèmes de refroidissement, dont un destiné à la batterie, dont l’entretien peut demander des heures.
Yves Racette souligne pour sa part que si nos routes cahoteuses mettent en effet à rude épreuve la suspension des VÉ, nos conditions climatiques rigoureuses provoquent souvent de la corrosion dans les boîtiers de contrôle et les connecteurs.
Pour Wilson Almeida, les freins régénératifs demandent une attention particulière.
Il souligne aussi que certains ateliers bien formés sont en mesure de remplacer des cellules dans les batteries, ce qui en évite le remplacement complet et coûteux.
Prendre la place
« Il faut que nos ateliers prennent leur place dans ce marché en allant chercher les compétences, souligne M. Almeida. Après la garantie du constructeur, les consommateurs vont vouloir des solutions plus flexibles et abordables pour entretenir leurs véhicules électriques. »
Steve Oborne va plus loin et présente tout le phénomène électrique sous un angle intéressant.
« Les VÉ sont bien faits et brisent moins, c’est un fait. Ils vont venir moins souvent en entretien dans nos ateliers. Mais cette baisse de volume, nous pouvons la compenser, comme je le fais, en chargeant plus cher pour l’entretien de ces véhicules. Je suis allé me former et m’équiper alors c’est normal de demander plus, et ce sera toujours plus économique pour le client que de retourner chez le concessionnaire. Et gérer moins de volume sur des travaux plus payants, c’est excellent quand on pense à la rareté de la main-d’œuvre que nous vivons dans notre domaine. »