Ce qui m’affecte le plus dans cette histoire de tarifs et d’annexation de notre pays par notre voisin du Sud, c’est mon sentiment d’impuissance. Heureusement, j’ai une solution pour dissoudre cette anxiété.
Au marché, dans ma main gauche, un sac de croutons made in USA. Dans ma main droite, le même produit, mais dans un sac de couleur différente, fabriqué au Canada, pour 20 cents de plus. J’achète. Si vous saviez à quel point ce geste, qui pourrait vous sembler futile, me fait du bien, vous seriez les premiers à me transférer 20 cents.
Ce geste peut sembler futile, mais il ne l’est pas. Je me souviens d’un voyage en Allemagne, où j’avais été impressionné de constater que presque tout ce qui m’entourait dans ma chambre d’hôtel était fabriqué en Allemagne. Même en jetant un œil à l’extérieur, toutes les voitures dans le stationnement, à quelques rares exceptions, étaient produites en Allemagne.
« Ce n’est pas plus cher que d’acheter ailleurs », ai-je demandé le lendemain à un collègue allemand. « Oui, mais ça fait travailler nos gens et tourner nos entreprises. » D’accord, c’est clair.
Il sera difficile pour notre industrie de se rabattre exclusivement sur des produits nationaux. Nous assemblons ici des voitures avec des composants locaux et étrangers. De plus, plusieurs véhicules proviennent d’Europe et d’Asie. Le prix des voitures et des pièces de remplacement, fabriquées aux États-Unis avec notre acier et notre aluminium, risque de gonfler.
J’entends que 120 000 à 150 000 emplois seraient en jeu au Québec si nos exportations souffrent de ces tarifs arbitraires sur une longue période. C’est un coup dur et injustifié pour notre économie. Cependant, avec environ 4,5 millions de travailleurs au Québec, on ne peut pas parler de l’écroulement de notre marché du travail.
J’en reviens à mes croutons. Si j’achète davantage de produits d’ici, les usines devront produire davantage et engager du personnel. Si ce choix, d’origine émotionnelle, que je semble partager avec un grand nombre de mes concitoyens, se maintient dans le temps, nous allons rapidement récupérer les emplois perdus. Un crouton à la fois.