Le département de service des concessionnaires est depuis toujours confronté au phénomène de la migration des véhicules vers les ateliers indépendants, après la période de garantie. Phénomène auquel il faut ajouter la réduction des entretiens nécessaires aux véhicules électriques.
Pour René Charbonneau, formateur spécialisé dans le secteur des concessionnaires depuis plus de 30 ans, actif notamment auprès des membres de la Corporation des concessionnaires automobiles de Montréal, le département de service reste un poste de profit intéressant. « Il y a un dicton chez les concessionnaires qui veut que le département des ventes vende le premier véhicule, mais que c’est celui du service qui vendra le second, et tous les autres. On doit insister sur l’importance de la qualité du service et des travaux effectués par l’équipe technique pour non seulement fidéliser les clients au département, mais qu’ils restent attachés au concessionnaire et à la marque lors d’un achat subséquent. »
Rester après la garantie
Selon René Charbonneau, il n’y a aucune raison pour laquelle un client devrait s’adresser à un atelier indépendant, phénomène courant après l’expiration de la garantie du constructeur. « Dès la première visite, il faut créer un lien avec le client, souligne M. Charbonneau. Appelons le client par son nom à son arrivée et ayons en main l’historique des entretiens de son véhicule. Les gens aiment qu’on les reconnaisse. Cette relation doit être appuyée par un travail transparent. La consigne est de ne pas vendre ce dont le véhicule n’a pas besoin. »
Yanick Jomphe, présidente de Consultants Y Jomphe, propose plusieurs pistes de réflexion à ce sujet : « Depuis toujours, nous savons que certains clients délaissent les concessionnaires pour aller dans un garage indépendant, pensant que les frais sont trop élevés. Personnellement, je crois que les clients devraient avoir un plan d’entretien prépayé après la fin de la garantie ou une carte fidélité privilège. Cette carte pourrait accumuler des points au rythme des changements d’huile, par exemple, et octroyer un changement sans frais après deux visites. Les concessionnaires devraient cibler les clients une année avant la fin de la garantie pour leur expliquer les possibilités au département du service quand leur garantie prendra fin. »
Équilibrer la clientèle
M. Charbonneau indique de son côté que liste des voitures de clients du département de service devrait être composée à 50 % de véhicules sous garantie et à 50 % de véhicules plus vieux. Pour conserver les clients tentés de s’adresser ailleurs, il faut déboulonner certains concepts. Ainsi, si le service peut sembler plus dispendieux que dans un atelier indépendant, le client doit savoir que le taux horaire reflète l’expertise des techniciens, parfois formés à l’étranger dans les installations du constructeur, et dont les compétences sont continuellement mises à jour. « Et il faut se méfier de certains forfaits de service qui semblent alléchants, mais qui, après y avoir regardé de plus près, reviennent plus chers que ceux offerts par le concessionnaire quand on ajoute tous les extras », met en garde M. Charbonneau.
Ce dernier recommande une discussion avec le client dont le véhicule atteindra bientôt l’échéance de garantie du constructeur. « Certains constructeurs offrent un programme d’entretien prolongé qui pourrait intéresser le client puisqu’il représente des rabais sur les services. Rien n’interdit à un concessionnaire, par ailleurs, d’offrir un escompte à un bon client sur les pièces et la main-d’œuvre, une pratique rentable sur le volume. Surtout, il faut prolonger l’expérience positive, en offrant le même service d’accompagnement, en livrant le véhicule dans les délais ou en proposant parfois des pièces du marché secondaire pour un client qui considère que celles d’origines sont trop dispendieuses. »
Adapter l’offre aux véhicules électriques
René Charbonneau constate, en fréquentant les départements de services des concessionnaires, que l’introduction graduelle de véhicules électriques y aura un impact. Il y a toutefois des entretiens à considérer en plus de ceux recommandés par le constructeur. Le cas classique concerne les freins qui tendent à rouiller faute d’être utilisés.
Nous avons demandé à Mme Jomphe comment, selon elle, le véhicule électrique change la donne en matière de service d’entretien : « Avant de répondre à cette question, il faut connaître le portrait actuel des propriétaires de voitures électriques. Il serait intéressant de mettre en place un focus group pour évaluer les attentes des électromobilistes. Les concessionnaires devraient créer des plans d’entretien spécialisés et séparés pour les véhicules électriques, sans plus attendre. Plusieurs clients ont déjà des voitures électriques et nous devons restructurer les cycles d’entretien périodique ou annuel. Lors de l’achat d’une voiture électrique, les concessionnaires pourraient proposer un plan d’entretien prépayé pour des services très précis répondant à ces besoins particuliers. »
Diversifier les services
Selon René Charbonneau, une des pistes de solution pour tirer le maximum des baies est d’y proposer de nouveaux services. « Il y a des concessionnaires qui ont consacré des baies peu utilisées à des services d’esthétique, illustre-t-il. On ne parle pas uniquement d’une zone où sont préparées les voitures neuves ou celles destinées à la revente, mais d’un service spécifique et lucratif. L’ajout d’un service de débosselage sans peinture peut aussi être apprécié par tous les clients. »
Il propose aussi des programmes de préparation hivernale et printanière pour combler les heures du département. Qui plus est, ces programmes pourraient être offerts à l’ensemble de la population, afin d’attirer de nouveaux clients dans chez le concessionnaire.
« Le département d’esthétique automobile peut s’avérer très rentable, quand le personnel y est, confirme Yanick Jomphe. Je suis tout à fait d’accord pour élargir au grand public tous les services du concessionnaire. La majorité des concessionnaires peuvent faire les entretiens sur tous les modèles de véhicules. Tout est affaire de se faire visible et d’expliquer à tous les clients que nous acceptons toutes les marques, pour les entretiens et l’esthétique. »