Savoir interroger les systèmes électroniques et en tirer des informations pertinentes est une nouvelle corde qui s’ajoute à l’arc des carrossiers.
Un nombre impressionnant d’ateliers ont envoyé des membres de leur personnel, qu’ils soient techniciens ou estimateurs, suivre la formation offerte par MJ Consultech de Michel Julien pour être en mesure de tirer des véhicules qui leur sont confiés toute l’information nécessaire à une bonne réparation.
Qui plus est, ces nouvelles habiletés technologiques leur permettent aussi de soumettre aux assureurs des dossiers complets indiquant tous les dommages et les calibrations qui seront nécessaires à compléter la réparation.
Si les carrossiers démontrent un intérêt réel pour cette technologie, les assureurs voient ce programme d’un bon œil puisque non seulement il permet à leurs équipes de mieux comprendre les méandres des analyses de données lors de l’estimation, il créer aussi un territoire de compréhension mutuelle entre eux et les carrossiers.
Nous avons d’ailleurs demandé à des assureurs comment ils perçoivent cette procédure de diagnostic. Stéphanie Béland, directrice conseil, communications, vision et culture chez Industrielle Alliance, Assurance auto, nous fait parvenir cette réponse :
« C’est effectivement un processus qui nous est utile en tant qu’assureur, surtout dans un contexte où la technologie est maintenant omniprésente dans les véhicules. C’est également un atout important pour une entreprise comme la nôtre où le souci de nos clients et leur satisfaction sont au cœur de nos décisions. »
Dans les ateliers
Nous avons sondé des ateliers ayant complété la formation sur les avantages que leurs équipes en tirent.
Un élément commun qui revient dans leurs témoignages est que leur capacité à compléter l’analyse et d’en tirer des documents d’estimation clairs et normalisés a grandement facilité la communication avec les assureurs.
« La possibilité de déterminer les dommages antérieurs et de partager nos résultats avec les assureurs est certainement quelque chose qu’ils apprécient », illustre Jennifer Gagnon, estimatrice à l’atelier Fix Auto Drummondville. Nous pouvons aussi soumettre une estimation plus détaillée qui va inclure le remplacement de capteurs et les programmations au besoin. »
L’atelier utilise des analyseurs (scanners) du marché secondaire, ce qui demande un certain apprentissage pour extraire le maximum de données électroniques du véhicule. Dans cette carrosserie, tous les véhicules sont scannés à leur arrivée même si cette pratique n’est pas demandée par tous les assureurs.
« Ça nous permet de découvrir ce que nous ne verrions pas autrement », résume Mme Gagnon.
Et l’analyse des données avant la livraison du véhicule au client permet parfois de trouver les derniers problèmes. Il peut simplement s’agir d’une pièce qui a été retirée et remise durant la réparation et qui doit être reprogrammée.
Tout comme Mme Gagnon, Bobby Lapierre technicien carrossier chez Bilodeau Collision à Lac-Mégantic, faisait déjà les analyses de données avant la formation de Michel Julien.
« Cela m’a toutefois permis d’approfondir ma compréhension des problèmes et de les partager plus facilement et d’une façon transparente avec les assureurs. Avec un portrait clair de la condition de toutes les composantes du véhicule, incluant les systèmes avancés d’aide à la conduite, nous réduisons le nombre de suppléments à discuter par la suite. »
Comme M. Lapierre l’explique, le balayage et l’analyse des données établissent un plan de match partagé avec l’assureur. « En suivant rigoureusement les processus des constructeurs dans la réparation et en partageant la démarche avec l’assureur il n’y a pas de surprises et moins d’appels et de discussions. »
Il cite par exemple le travail qu’il venait de faire sur une camionnette F150 où un radar devait être remplacé. « L’assureur comprenait qu’avec le remplacement il y aurait aussi une programmation facturée. »
Viser l’autonomie
Cet atelier CarrXpert se veut autonome en matière de programmation, mais aussi de calibration des systèmes ADAS. Cette stratégie vise à faire les travaux à l’interne au lieu d’envoyer le véhicule chez le concessionnaire ce qui peut causer des délais supplémentaires.
Pour M. Lapierre, la formation en balayage et analyse des données est un incontournable pour les ateliers afin qu’ils mettent à jour leurs connaissances.
« Nous sommes bien placés pour comprendre à quel point les véhicules deviennent complexes et comportent des systèmes électroniques complexes, insiste-t-il. Et on ne parle plus que des véhicules haut de gamme. Tous les véhicules doivent être analysés lors de l’estimation, ce sont des minutes bien investies. »
Il effectue aussi systématiquement le scan avant de remettre le véhicule au client.
« Quand je remets les clés, je sais que mon client est en sécurité. C’est important pour moi et notre atelier répare les véhicules comme s’ils nous appartenaient personnellement. »
Claude Taylor, copropriétaire de l’atelier CARSTAR Rawdon, ne pourrait être plus d’accord avec cette conclusion.
« Les automobilistes aujourd’hui se fient beaucoup plus aux systèmes d’aide à la conduite. Réparer la carrosserie demande maintenant une analyse beaucoup plus approfondie, ce qui implique la maîtrise de l’analyse des données électroniques. Comme professionnels de la réparation automobile, nous devons être en mesure de remettre la voiture au client en toute confiance. »
Comprendre les conséquences
Appuyée par le processus de réparation exigé par le constructeur pour corriger les dommages, l’estimation détaillée et enrichie par les données électroniques donne tous les détails à l’assureur.
« Si la formation en balayage et en analyse des données m’a appris quelque chose, c’est l’importance du ADAS et des conséquences possibles de ne pas s’en occuper correctement. Heureusement, les assureurs commencent à mieux le comprendre et notre capacité de leur démontrer noir sur blanc contribue à ce qu’ils démontrent beaucoup plus d’ouverture. »
Ces trois intervenants soulignent qu’avec une estimation détaillée, normalisée et comprenant toutes les données pertinentes, les assureurs questionnent beaucoup moins, sinon pas du tout, les frais liés aux réparations, analyses, programmations ou calibrations, qu’elles soient faites à l’interne ou par un sous-traitant.
Yves Robichaud, directeur de zone pour le Québec chez CARSTAR, qui a été un des premiers à partager avec son équipe l’importance de maîtriser l’art du diagnostic électronique afin de préparer des estimations détaillées considère qu’il fait maintenant partie des savoir-faire de base pour un carrossier.
« Faire une analyse des données et comprendre ce que les résultats impliquent dans le processus de réparation rend la communication plus simple avec l’assureur.
« Nos ateliers font leurs devoirs, sont parfois en avance sur l’assureur et peuvent lui dire avec plus de certitude ce qui doit être fait lors de la réparation.
« Et les technologies progressent tellement rapidement qu’il faut intégrer ces analyses dans nos pratiques courantes. C’est pour ça que je dis aux ateliers d’y aller et de se former, si ce n’est pas déjà fait. »