Ce qu’il faut comprendre en premier lieu, c’est que le Québec fait très bonne figure non seulement au Canada, mais à l’échelle mondiale. Fini depuis longtemps les pneus usés simplement balancés dans la nature. Ici, grâce notamment à l’étroite collaboration des marchands et ateliers, 98 % des pneus récoltés sont recyclés. En fait, à peine 2% des 8.7 millions de pneus récupérés en 2024 au Québec (soit 109 000 tonnes) étaient en si piètre condition ou d’une taille si inhabituelle qu’ils ont dû être brûlés (valorisation énergétique, comme le veut l’euphémisme d’usage).

À titre de comparaison, en Suède, 70% des pneus usés sont simplement brûlés alors que le tiers des volumes connaît le même sors aux États-Unis.

Bref, ces pneus alimentent une étonnante variété d’entreprises d’ici qui vont remouler ou réchapper les meilleurs candidats, transformer les autres en tapis ou les réduire en granules ou poudre entrant dans la composition d’autres produits.

Un réseau efficace
Sabrina Charron, directrice du programme québécois de gestion des pneus hors d’usage, a pris quelques instants pour s’adresser directement aux ateliers et centres de pneus participant à cette belle réussite lors d’une brève discussion avec Autosphere. « Nous leur remémorons les consignes visant à s’assurer, par exemple, que les pneus déposés pour la collecte ne soient pas montés sur des jantes et de ne pas hésiter, s’ils ont des questions, notamment à propos de notre portail, de nous donner un coup de fil. »

Elle a mentionné que les délais de ramassage avaient retrouvé une séquence plus normale. Le transport est un enjeu de première importance dans l’industrie. En fait, les frais de transport grugent plus de la moitié des revenus tirés des frais environnementaux (4.5$ voiture et 6.5$ camion) chargés à l’achat de pneus neufs.

La directrice a aussi expliqué que malgré certaines embûches, notamment liées à la sélection de véhicules, le projet pilote de collecte avec des camions électriques dans la région de Laval allait se poursuivre.

Parlant de projet pilote, l’organisme mène aussi une expérience commerciale avec la firme RTS visant à détourner les pneus usés commerciaux vers une usine de rechapage, si leur condition s’y prête. Ce projet d’une nouvelle vie pour les pneus commerciaux demande l’ouverture de nouveaux débouchés. Cependant, ne remettre qu’une nouvelle bande de roulement sur une carcasse en bonne condition permet de conserver 80% de sa masse, un gain environnement significatif.

Parlant de donner une seconde vie à des pneus, l’arrivée massive de pneus asiatiques bas de gamme vient perturber ce marché à fort potentiel de croissance. Ces pneus peu coûteux seraient détournés en masse vers le Canada afin d’éviter les lourds tarifs imposés par les Américains. Bref, le résultat est qu’il est parfois plus économique d’acheter un pneu neuf d’Asie de cette catégorie qu’un pneu remoulé ou rechapé ici, même si l’écart de qualité en fait une fausse économie à l’usage.

Dans le prolongement de cette idée, Hélène Gervais, conseillère en environnement pour Recyc-Québec, est venue parler d’économie circulaire. Pour le pneu, elle mentionne l’importance de réduire la consommation et, justement, de leur redonner une nouvelle vie. « On parle aussi d’écoconception, souligne-t-elle, une approche intéressante qui vise à produire des pneus qui vont durer plus longtemps ou qui offre une moindre résistance au roulement, entraînant des économies de carburant. »

Finalement, mentionnons que l’organise a mandaté l’Université Laval, une institution qui s’est montrée très collaboratrice dans les solutions de valorisation des pneus, pour mener une étude sur l’impact de l’essor des véhicules électriques sur la consommation des pneus au Québec. L’objectif est de prévoir l’effet sur les volumes à venir.