Nicolet. Contrefort des valeurs québécoises, c’est dans cette ville qu’est établi près de l’Institut de police l’un des excellents experts du pneu.
L’horloge du temps nous fait remonter aux années 60, époque où l’automobile était la merveille du siècle ; à peine était-elle dépassée par les fusées de ladite conquête spatiale.
Ici-bas, c’était à une autre conquête à laquelle il fallait se préparer : celle de la maîtrise continue de la technologie grandissante des véhicules, dont le développement allait être trépidant.
Combien de jeunes se garrochaient pour tripler leur plaisir en étant pompistes : excellente façon de se faire des sous en se mettant le nez dans la mécanique, et de voir de très près les rutilantes américaines.
Avant le détour de 4000 km
C’est ainsi que Jacques Jutras, dont la famille habitait à Sainte-Perpétue, dans la zone d’influence immédiate de la cité ecclésiastique, avait mis pieds et mains dans ce modernisme.
En cette époque qui soulevait aussi bien les passions par les coupes Stanley que par le flot incessant de nouvelles voitures plus attirantes et musclées les unes que les autres, il ne pouvait s’imaginer ailleurs.
Rien d’étonnant à ce qu’à la suite des diplômes de Mécanique et de Diesel décrochés à Drummondville et Trois-Rivières, alors que le nouveau pont reliait enfin les rives du fleuve, il ait débuté en un lieu quasi mythique.
Formé après une 10e année Sciences-Lettres par Gervais Bossé, Gilles Caissie et Robert Lamothe, le fondateur de PH Vitres d’Autos, Paul-Henri Jutras, avait eu la chance de l’embaucher dès 1968.
Une expérience étonnante
Deux ans plus tard, attiré par d’avantageuses conditions, Jacques Jutras a eu le cran de passer par la mine d’amiante de Baie Déception, près de Salluit, avant de s’établir après quelques mois sur la Rive-Sud de Montréal.
De l’entretien de la machinerie de chantier sous des froids polaires, il a bifurqué vers celui des concessionnaires automobiles, et a même eu sa propre station SUNOCO, chemin Chambly à Longueuil.
Avant son retour dans sa région natale, il aura de plus été durant une dizaine d’années au cœur de l’exponentiel marché du pneu en étant au sein d’une entreprise presque naissante : Pneus Chartrand.
Étrangement, c’est un restaurant de Nicolet qui lui était ensuite tombé dans l’œil, mais au caractère exclusif, puisqu’il avait pignon dans l’ancienne concession FORD du légendaire Gérard Grenier.
Trois conditions cruciales
Situé à une intersection de l’École nationale de police, il y a feu et lieu depuis 1987, solidement ancré sur les principes et les pratiques qu’il souhaiterait être partagés par la jeune génération.
Lui demande-t-on lesquels, que la réponse est instantanée : passion, responsabilité et persévérance ; ce qui a été et demeure le moteur qui, avec le plaisir de rendre service, le comble encore.
À l’exemple du milieu de l’entretien, il se désole donc de subir depuis quelques années l’incompréhensible phénomène de la difficulté à recruter les jeunes qui devraient normalement assurer l’avenir de l’industrie.
Comme d’autres collègues, Jacques s’attriste de ne pouvoir retenir cette main-d’œuvre chez qui les relations sociales par téléphone et textos passent avant tout.
Prêt pour la saison 2020
Depuis 2 ans, cinq recrues ont été invitées à quitter pour cette raison, et tout laisse croire qu’il sera impossible pour un troisième automne de recruter des surnuméraires, fût-ce par Emploi-Québec ou Facebook.
À tout prendre, il préfère ne s’en remettre qu’à son équipe permanente, puisque le coût des délicats systèmes de surveillance de la pression et des fragiles jantes est trop élevé pour les confier à des non-initiés.
Le fait qu’il faille un rendez-vous de 60 minutes pour le remplacement des roues ou la pose de pneus prouve cependant à ses clients que la qualité du service ne peut être que du plus haut niveau de professionnalisme.
Sa politique de rendez-vous a d’ailleurs fait en sorte que le traditionnel goulot de la tombée du 15 décembre n’existe plus. Bien que la date ait été avancée au 1er décembre, ses clients s’y sont bien adaptés.
De solides bras droit
Jacques Jutras reconnaît qu’il a la chance de compter sur une équipe dont l’expertise est précieuse sous tous les aspects, tant d’ailleurs en matière d’alignement que de service aux producteurs agricoles.
Il s’estime très chanceux que Sylvain Pronovost soit à ses côtés depuis 20 ans, un fort atout en relations avec la clientèle, comme d’avoir bénéficié durant 10 ans du savoir de l’ancien agriculteur Jean-Bruno Dupuis : un oncle à qui il doit la renommée de son service de pneus de ferme.
Mais sans sa femme, Marie Fontaine, experte en administration et services juridiques, et l’apport de même que le soutien important de leurs filles Myriam et Geneviève, son histoire aurait sans doute été différente.
Enfin, comment ne pas terminer sans s’arrêter à l’image de ce garçon de 10 ans que les gens de Sainte-Perpétue avaient été surpris de voir héler le premier camion en bois qu’il avait fabriqué, premier indice de la vocation de Jacques Jutras.