Depuis quelque temps, la durabilité environnementale et sociale est devenue un sujet incontournable dans l’industrie automobile. Mais intégrer une démarche réellement durable au cœur de son modèle d’affaires demande de la réflexion et un engagement soutenu, qui doivent mobiliser l’ensemble de l’organisation. Lorsqu’on y parvient, les retombées peuvent être nombreuses et significatives. Pour mieux comprendre ce que cela implique concrètement, Autosphere s’est entretenu avec Drew Collier, président et chef de la direction de LGM Financial Services — une entreprise où chaque décision s’appuie sur une logique de durabilité. Voici ce qu’il nous a confié :

Autosphere : Quels sont, selon vous, les éléments clés pour mettre en place des pratiques de durabilité cohérentes et efficaces dans le contexte actuel ?
Drew Collier : Aujourd’hui, avec tout ce qui se dit autour de la durabilité et un contexte assez instable, il peut être difficile d’obtenir des repères clairs et de comprendre ce que ce mot recouvre vraiment. Chez LGM, nous la définissons à travers trois grands piliers. Le premier, c’est la capacité de mesurer les actions mises en place, en s’appuyant sur une approche scientifique, notamment en matière de gouvernance environnementale et sociale, de bien-être des employés et d’équité entre les genres. Le deuxième pilier, c’est la transparence : être honnête et factuel, même quand tout n’est pas parfait. C’est essentiel pour instaurer une relation de confiance avec les consommateurs (un facteur clé dans le commerce automobile). Par exemple, il faut reconnaître que les véhicules électriques ont de réels avantages, mais qu’ils ne conviennent pas à tout le monde ni à tous les usages. Enfin, le troisième pilier touche à la logique d’affaires. Ce point est particulièrement important dans un environnement qui évolue aussi vite. Lors du précédent cycle économique, beaucoup se sont laissé emporter par l’enthousiasme autour de la durabilité. Aujourd’hui, le climat est plus pragmatique, mais cela ne veut pas dire qu’il faut revoir ses priorités. Il y a de très bonnes raisons d’adopter des initiatives de durabilité lorsqu’elles sont ancrées dans une stratégie d’entreprise solide. Chez LGM, nous avons intégré cette logique à notre stratégie globale. Elle repose sur une approche circulaire : soutenir les constructeurs, les marques et les concessionnaires avec lesquels nous travaillons, quelle que soit l’évolution du marché. Au bout du compte, il s’agit de traiter les gens équitablement, qu’il s’agisse des professionnels du secteur ou des consommateurs. Et dans le domaine du financement et de l’assurance, c’est fondamental.
Autosphere : Pouvez-vous nous parler de l’approche de LGM en matière de durabilité, et des façons concrètes dont elle contribue au succès de l’entreprise ?
DC : Il faut remettre les choses dans leur contexte. Chez LGM, nous avons toujours eu une culture axée sur la durabilité, initiée par notre fondateur, Adam Hill. Il a transmis à l’entreprise une volonté forte de redonner à la communauté et à l’industrie, ce qui est devenu une base de notre fonctionnement. En 2019, à l’occasion de notre 25e anniversaire, nous avons officialisé cette culture en lançant notre mission sociale, intégrée à un nouveau plan stratégique. Ce plan définit notre raison d’être : favoriser une mobilité responsable et accessible à tous. Nous avons aussi identifié des pistes d’amélioration pour l’ensemble du commerce automobile, comme l’élévation de l’expérience client ou le renforcement de la fidélité envers les marques partenaires. Chez LGM, cela passe par une stratégie d’affaires alignée sur cette mission et par une équipe engagée, qui aime travailler ici et se mobilise pour offrir une excellente expérience client. Et nous avons constaté que lorsque ces deux priorités stratégiques sont bien mises en œuvre, la croissance rentable suit naturellement. Mais ce n’est pas qu’une question de revenus : il s’agit aussi de rester pertinent, de servir un grand nombre de clients et de renforcer la réputation des marques partenaires. Une fois cela en place, on peut aller plus loin, en contribuant activement à la durabilité sociale et environnementale du secteur.
C’est à ce moment-là qu’il devient possible d’impliquer à la fois les clients et les employés dans cette démarche. C’est ainsi que la responsabilité sociale s’intègre à notre stratégie. À titre d’exemple, nous avons lancé en 2016 la campagne « Dealers Against Distracted Driving ». À l’époque, la réglementation était quasi inexistante, mais nous avons voulu sensibiliser à la sécurité routière. Plus récemment, nous avons veillé à ce que nos gestionnaires de placements adhèrent aux principes des Nations Unies pour l’investissement responsable. Nous avons aussi réduit notre empreinte carbone, notamment en adoptant un mode de travail hybride qui limite la présence quotidienne au bureau. Cet ajustement a eu un effet très positif et mesurable. Nous collaborons aussi avec le Pacte mondial des Nations Unies, qui nous aide à repérer les bonnes pratiques pour améliorer notre comportement d’entreprise citoyenne. Depuis 2025, nous avons aussi renforcé nos efforts en faveur de la parité et de la diversité au sein de nos équipes. Nous avons constaté que des collaborateurs issus de milieux différents génèrent plus d’idées nouvelles, de créativité, et sont mieux à même de comprendre notre clientèle.
Autosphere : À partir de votre expérience, quels enseignements les autres entreprises pourraient-elles tirer pour définir leurs propres démarches de durabilité à court, moyen et long terme ?
DC : Avant tout, il faut le faire pour les bonnes raisons. Chez LGM, ce n’est pas qu’une question d’image ou d’altruisme, même si faire ce qui est juste a son importance. C’est aussi parce que cela soutient concrètement notre stratégie d’affaires. Se concentrer sur la durabilité et la responsabilité sociale nous a permis de construire une image de marque employeur forte, et d’attirer certains des meilleurs talents du secteur. Je suis très fier de l’équipe que nous avons réunie, et les résultats sont là. Nous avons obtenu d’excellentes performances pour nos partenaires, en matière de croissance, de taux de pénétration et de rentabilité. Il faut aussi s’appuyer sur une structure claire. Pour nous, collaborer avec des organismes comme le Pacte mondial de l’ONU a été très bénéfique : cela offre un cadre, des repères, et des critères d’évaluation. Chaque année, notre objectif est de progresser, de raffiner nos processus et de former nos équipes en conséquence. Nous accompagnons aussi nos clients concessionnaires dans cette transformation, pour les aider à mieux comprendre l’importance de la mobilité responsable et du respect du consommateur. Même si l’attention du marché se porte actuellement sur d’autres enjeux, comme les droits de douane, il est crucial de rester cohérent et de continuer à innover pour obtenir des résultats de qualité — pour son entreprise, ses employés et ses clients.
Autosphere : Comment l’approche de LGM en matière de durabilité est-elle perçue par vos clients, et quel en est l’impact dans le secteur du commerce automobile ?
DC : Plusieurs exemples me viennent à l’esprit. Nous avons notamment participé à la création de la première station de ravitaillement en hydrogène au Canada. Cette initiative nous a permis d’entrer en relation avec des constructeurs investis dans cette technologie. Elle a aussi ouvert la voie à des expériences positives pour nos clients. Cela rejoint notre volonté d’innovation et d’engagement des employés — des éléments essentiels pour offrir une expérience client de qualité. Chaque mois, nous mesurons la satisfaction des concessionnaires, et elle atteint généralement 95 %, avec un fort taux d’engagement des employés. Pour maintenir ce niveau, il faut rester à l’écoute et évoluer en phase avec nos partenaires, sans chercher à les devancer à tout prix. L’adoption des véhicules électriques en est un bon exemple : certains constructeurs ont choisi d’intégrer une prise à tous leurs modèles, qu’ils soient électriques ou hybrides rechargeables. Cette approche est bien plus pertinente que d’imposer des véhicules 100 % électriques à des clients qui ne sont pas prêts ou qui n’en ont pas besoin. Il reste encore beaucoup à apprendre, mais nous sommes fiers de participer à cette évolution, qui permet des avancées tant sur le plan économique que social et environnemental.
Autosphere : Un dernier mot ?
DC : Dans un contexte où beaucoup de sujets deviennent très politisés, il ne s’agit pas de prétendre détenir la vérité ou de se donner le beau rôle. Il faut plutôt chercher des moyens de servir les intérêts à long terme de l’industrie, des marques et des clients. Nous avons constaté que les initiatives de durabilité et de responsabilité sociale offrent de nombreux avantages directs et indirects : elles renforcent l’image employeur, améliorent l’expérience client, et reposent tout simplement sur des pratiques de gestion solides… et du bon sens.