Malgré deux décennies les séparant, la nouvelle relève diffère peu de celle du début du siècle.
Les conditions des usines sont fort attirantes à l’adolescence, mais ceux qui adorent les défis préfèrent, au premier ou second choix, un emploi qui peut faire oublier les 28 000 secondes du quotidien.
C’est le cas d’Éric Bilodeau, 37 ans, propriétaire depuis mi-21 du Centre de l’auto Perron de Lac-Mégantic : un atelier acquis après 20 ans de fidélité, et en avoir vivement rêvé dès qu’il y avait mis le pied.
À peine en avait-il pris les clés, qu’il proposait à une nouvelle carrossière et peintre fraîchement formée au CIMIC en mode DEP dual d’intégrer l’équipe : Sara-Maude Maheux, déjà une alliée d’importance.
Éric ne sait que trop qu’elle saura trouver ses aises puisqu’il l’a accompagnée, comme ce fut le cas pour d’autres stagiaires avec qui il a partagé trucs et astuces appris depuis qu’il est dans le métier.
Dans le cas de Sara-Maude, ce type de partenariat est une réussite, et il souhaite par la même formule répéter l’expérience en accueillant d’autres stagiaires aussi intéressés que sa jeune protégée.
Une rigueur mathématique
Énergique, Éric admet que l’école n’était pas son lieu de prédilection : trop de théorie par rapport à sa passion pour le travail manuel, bien qu’il relevait les défis mathématiques avec facilité et enthousiasme.
Ceci n’avait toutefois que peu à voir avec la satisfaction, à 10 ans, de « remettre en service » une voiturette ou, à l’adolescence, de laver avec application les tracteurs des semi-remorques de Quiroy Transport.
Cette tâche, qui exigeait un bienfaire de A à Z, lui procurait autant de plaisir que celle de camelot, qui l’avait sensibilisé au sortir de l’enfance à l’importance du sens des responsabilités et de la discipline.
Quant à sa concentration et à sa persévérance, Éric les doit aux LEGO que ses jeunes jumeaux l’ont amené à sortir des boîtes depuis longtemps rangées, jeu dont le concept initie à la rigueur et incite à la créativité.
Élève et maître à la fois
Après s’être imaginé camionneur ou tailleur de pierre le temps d’en connaître les contraintes, et avoir brièvement été journalier dans une fabrique de palettes, il s’est félicité d’avoir opté pour la carrosserie.
À la fois ses guides, premiers et seuls employeurs, les frères Gilles et Luc Perron, ont vite compris qu’Éric Bilodeau avait les qualités requises pour exercer le métier et devenir un propriétaire averti.
Il aime d’ailleurs se rappeler que, durant son DEP au Centre 24-Juin, son habileté en masquage et ponçage était d’un tel niveau, que les démonstrations qu’il en faisait emballaient enseignants et élèves.
Être à ton tour propriétaire à l’enseigne de CARSTAR Lac-Mégantic est un défi qui enthousiasme Éric, la passion du métier, du travail bien fait et du dépassement ayant toujours marqué son parcours.
Au fait, au sortir de sa formation, il roulait avec une Mercury Cougar V6 2002 à traction, qu’il avait lui-même garnie de la livrée de la série des onze films Rapides et Dangereux.
« Une claque dans la face »
Si Éric Bilodeau avait opté pour la carrosserie avec le fort assentiment de son frère, une conseillère scolaire avait plutôt jugé Sara-Maude Maheux trop féminine pour faire de même. « Une claque dans la face, dit-elle. »
Au fond, ce mauvais « conseil » la fait bien rire. Avoir pareil réflexe à la seule vue de son apparence, c’était tout ignoré de sa personnalité plutôt flamboyante, de sa vivacité et de son univers.
Sara-Maude aime les « chars à propulsion qui marchent », mais aussi – surprise ! – sa paire de chevaux dont elle ne peut se séparer… sa jumelle et elle ayant eu à 4 ans chacune un « pony » !
Un départ en « 2JZ »
Présenter la météo à la télé l’avait presque tentée, sauf que la « glisse » (drifting ou dérapage contrôlé) dont raffolait un copain en carrosserie, et le touche-à-tout de l’entretien et de la modification l’ont rapidement « contaminée ».
Sensible aux autos à « belles fesses », Sara-Maude craque en 2019 pour une Lexus IS 300 2JZ 2004 – une « première génération de 6 en ligne » – dont elle dû se défaire, trop coûteuse à restaurer.
Elle s’en était séparée à contrecœur, vu tout le soin porté à une première voiture pour laquelle on a craqué, dont les vidanges et le remplacement des freins sous l’œil averti de ses mordus de bolides.
Aérographie et « DSP »
Eh oui, c’est ce type d’initiation à l’automobile qui l’a attirée vers la Carrosserie au grand étonnement de sa mère qui, après le choc, s’est donné pour mission de l’appuyer au point d’en être presque son agente.
La preuve en est le cadeau qu’elle lui avait fait l’an dernier à l’occasion de ses 20 ans : un aérographe IWATA recommandé par ses enseignants du CIMIC de Saint-Georges.
Comme c’est au Centre de l’auto Perron qu’elle a fait 40 % de son cours en dual, elle y développe aussi ce talent avec l’aisance que favorise un « esprit de camaraderie bien masculin » qu’elle y apprécie.
Pour la combler, il ne lui manque que la technique du DSP, débosselage sans peinture, si recherchée lors des dévastateurs épisodes de grêle.