Parler de la rareté de main-d’œuvre est redondant. Voyons plutôt certaines solutions envisagées ou appliquées dans les centres de pneus pour améliorer la situation.
Évidemment, on voit encore affichés sur les devantures des marchands de pneus les appels aux candidats, surtout en prévision de la forte saison de pneus. Mais au-delà de ces besoins saisonniers, des centres de pneus cherchent aussi des techniciens qualifiés pour leur permettre d’enrichir leur offre de services de mécaniques automobiles, ce qui est maintenant pratique courante dans ce segment de l’industrie.
Marc-André Boisvert, président de l’Association des Spécialistes en Pneus et Mécanique du Québec (ASPMQ), offre d’ailleurs cette perspective à ses membres :
« Face à la pénurie de main-d’œuvre qui touche nos ateliers, il est impératif que nous envisagions des approches différentes pour surmonter ce défi. Nous sommes confrontés à une réalité où les ressources humaines sont devenues un enjeu important pour le bon fonctionnement de nos entreprises. »
« Je vous encourage à explorer diverses solutions pour pallier ce manque de main-d’œuvre. Parmi les pistes à envisager, je vous invite à considérer le rappel des retraités ; ceux-ci possèdent une expérience précieuse qui pourrait apporter une contribution significative à nos équipes. De même, le recours à des étudiants peut être une option intéressante pour combler certains postes et offrir une expérience enrichissante à de jeunes talents. »
Des pistes originales
Il ajoute que l’embauche de travailleurs agricoles saisonniers est aussi une ressource souvent sous-estimée, mais qui peut s’avérer très efficace.
« Enfin, le recrutement à l’international représente une opportunité qui permettrait d’apporter de nouvelles compétences et perspectives à nos équipes », conclut M. Boisvert.
Parlant du recrutement international, une approche dont nous attendons beaucoup parler, c’est la piste qu’a suivi Frédéric Ouellet depuis des années. M. Ouellet est propriétaire de six centres de pneus sous la bannière OK Pneus à Montmagny, Charest, à La Malbaie, à Shawinigan-Sud, à Cap-de-la-Madeleine et à Trois-Rivières. Ses ateliers ont besoin depuis longtemps de ces ressources humaines supplémentaires, et pas uniquement en périodes de pointe.
Ses ateliers répartis le long du fleuve comptent une centaine d’employés. Parmi eux, une douzaine de Mexicains arrivés au cours des dernières années y travaillant sur une base permanente. M. Ouellet s’est adressé à une agence spécialisée dans le recrutement international. Il explique que la démarche prend en général entre dix mois et un an et que chaque candidat retenu a demandé un investissement d’environ 8000 $.
« Des quatre qui sont arrivés en premier, il en reste trois, ce qui est une bonne moyenne explique M. Ouellet. De plus, ce sont des mécaniciens de formation qui n’ont demandé que des ajustements pour prendre leur place dans l’équipe. En fait, on les accueille et les encadre comme des Québécois, et nous leur offrons les mêmes conditions quand ils sont à niveau. »
Comme des Québécois
Le fait d’accueillir des travailleurs étrangers représente une planification d’un autre niveau comparativement à un Québécois. Le premier groupe a eu droit à des logements dans un édifice locatif, une situation qui a évolué alors qu’aujourd’hui, les mêmes travailleurs logent dans une maison achetée et complètement aménagée pour eux par leur employeur.
« Je constate que la moitié des travailleurs étrangers vient pour l’argent, l’autre moitié souhaite s’installer ici de façon permanente, explique le gestionnaire. On peut voir l’engagement de ceux qui veulent rester ici à long terme, ne serait-ce que par leurs efforts de francisation. Si je veux qu’ils restent, il faut mettre toutes les chances de notre côté, notamment en investissant dans la formation des plus motivés. »
Frédéric Ouellet va-t-il avoir recours au recrutement international pour combler d’autres postes ? « Ça fait trois mois qu’on cherche un aviseur technique au Québec, sans succès. C’est certain que je vais demander des renforts du Mexique ou d’ailleurs », nous offre-t-il en guise de réponse.
Une démarche structurée
Si M. Ouellet s’est adressé à une agence spécialisée pour l’appuyer dans sa recherche de ressources humaines à l’étranger, c’était assurément pour se simplifier la vie. Faire venir ici des travailleurs qualifiés, particulièrement à la lumière du récent resserrement des conditions d’entrée des travailleurs mexicains, est un véritable parcours du combattant.
Karim Mouldi est président de Canari Recrutement International, basé à Montréal. Ce consultant en immigration canadienne agréé possède plus de 20 ans d’expérience dans le domaine du recrutement de travailleurs étrangers qualifiés. Il connaît bien les centres de pneus, qui se tournent vers ses services pour dénicher des mécaniciens qualifiés pour compléter leurs services ou des travailleurs saisonniers pour les dépanner durant les périodes de pointe.
« Oui, plusieurs centres de pneus et mécanique vont recourir à de la main-d’œuvre étrangère pour combler leurs besoins temporaires et permanents, confirme l’expert. C’est une des solutions qui s’imposent dans la condition du marché du travail que nous connaissons aujourd’hui, que ce soit pour de courtes périodes ou du long terme. L’important, c’est de s’adresser à des firmes établies qui ne vont pas vous proposer n’importe qui, mais vraiment les gens dotés des qualifications qui répondent aux besoins des ateliers. »
Mouldi travaille avec les pays francophones, sachant que la langue est souvent une barrière à l’intégration et à la mise à niveau. « Notre agence trouve et valide des techniciens qui travaillent comme nous sur des véhicules que l’on connaît. Notre équipe s’occupe de toutes les démarches et paperasses et garantit la satisfaction du client trois mois, pour s’assurer d’un bon arrimage entre le candidat et les besoins de l’entreprise qui le reçoit. Je ne peux pas changer des pneus, mais je peux trouver quelqu’un qui va le faire », conclut M. Mouldi avec le sourire.