L’autopartage est un phénomène en croissance, surtout dans les grandes villes comme Montréal, où les particuliers délaissent de plus en plus l’achat de voitures pour se tourner vers la location. Mais qu’en est-il des gestionnaires de parcs ? Tirent-ils aussi profit de cette tendance ?
Interrogés tour à tour par CamAuto, Cédric Mathieu, directeur de Turo au Canada, et Marco Viviani, vice-président, Développement stratégique chez Communauto, adoptent un discours similaire. Ils estiment que les gestionnaires de parcs, en général, mettent du temps à effectuer le virage. Selon leurs statistiques, l’option de fournir une allocation à leurs employés pour qu’ils accèdent aux voitures en libre-service – plutôt que d’entretenir un parc automobile coûteux et souvent sous-utilisé – n’est pas suffisamment envisagée.
Concrètement, M. Viviani remarque une augmentation générale d’environ 10 % des abonnements chez Communauto, d’année en année, mais pas de progression marquée du côté des compagnies par rapport aux individus. En fait, les abonnés corporatifs ne représentent que 5 % de la clientèle au Québec, une proportion que le vice-président souhaite voir grimper à 20 % prochainement, en misant sur une approche différente auprès des entreprises.
M. Mathieu, de son côté, ne tient pas de chiffres précis par rapport à sa clientèle corporative, puisque Turo n’est implantée au Canada et au Québec que depuis avril 2016. Rappelons que la plateforme permet à des particuliers de louer leur véhicule à d’autres particuliers, un service en ligne semblable à celui offert par Airbnb, qui pour l’heure s’adresse surtout aux voyageurs.
« Comme nous sommes encore en émergence ici, nos usagers sont surtout des particuliers dans le moment, explique-t-il. Mais la création de partenariats avec de grosses sociétés est un axe intéressant que nous souhaitons explorer. »
Adopter la bonne approche
M. Viviani et M. Mathieu mettront donc les bouchées doubles en 2018 pour améliorer le taux d’engagement des entreprises envers leurs services. Conscients que plusieurs gestionnaires ne se départiront jamais de leur parc automobile, ils envisagent de leur présenter des technologies leur permettant de maximiser l’utilisation des véhicules qu’ils possèdent déjà.
« Notre approche auprès des compagnies se ferait en deux volets. Dans un premier temps, nous voulons inciter les nouvelles entreprises à s’abonner à Communauto plutôt que de faire l’acquisition d’un parc automobile. On pense à améliorer notre système de tarification et à l’adapter à la clientèle corporative, entre autres. Aussi, nous voulons proposer aux gestionnaires qui ont déjà leur parc une application permettant à leurs employés de partager les véhicules à l’interne », indique M. Viviani. Grâce au système installé à même le parc automobile, les travailleurs pourraient savoir, au moyen d’une carte ou d’une application, à quel moment une auto est libre.
« Pourquoi ne pas acheter moins de voitures et rentabiliser l’utilisation de chacune au moyen d’une technologie efficace ? C’est ce que nous voulons proposer bientôt par un projet pilote. »
Chez Turo, M. Mathieu compte suggérer aux entreprises d’inscrire leurs véhicules sur sa plateforme lorsqu’ils ne sont pas utilisés.
« On calcule que chaque voiture que comprend un parc automobile servira en moyenne cinq minutes par jour. Il serait intéressant pour les gestionnaires de louer leurs véhicules à l’externe, grâce à Turo, lorsqu’aucun employé ne s’en sert. Ils pourraient ainsi faire des profits et rentabiliser leur parc. »
Bref, selon les deux intervenants interrogés, les entreprises n’auront éventuellement pas le choix d’envisager de nouvelles façons de gérer leur parc automobile ; ils estiment que l’économie de partage représente « l’avenir ». Il en revient également aux plateformes de voitures en libre-service, croient-ils, d’offrir des services mieux adaptés à ce type de clientèle.