Le garagiste a le devoir légal d’installer des pneus conformes sur toutes les voitures qui arrivent en atelier, quelle que soit leur provenance.
En d’autres termes, si un client se présente en atelier avec des pneus trop usés, trop abîmés, retravaillés illégalement, bref, non conformes, le spécialiste a non pas le droit, mais le devoir d’en refuser l’installation. Ce client a beau insister et prendre l’entière responsabilité des pneus qu’il s’est achetés, il pourrait bien revenir dans les semaines qui suivent, avec son assureur, pour tenir l’atelier responsable d’un accident de la route.
Une responsabilité légale
Comme l’expliquent Me Chanel Alepin et Me Ian Lacombe, avocats au cabinet Alepin Gauthier, le mécanicien est tenu à une obligation de résultat et doit s’assurer que les pneus posés vont permettre à la voiture de rouler convenablement. « En vertu de la loi sur la protection du consommateur, les travaux du mécanicien sont couverts par une garantie légale que ce dernier doit obligatoirement respecter », résume Me Alepin.
Même au terme d’une entente avec le client, le garagiste ne peut se soustraire à cette caution judiciaire. Si le client revient en atelier parce que les pneus posés au préalable n’étaient pas conformes – ce qu’il doit faire à l’intérieur d’une période de 3 mois ou 5000 km –, le commerçant sera tenu d’installer gratuitement les nouveaux pneus conformes qu’on lui fournira.
La responsabilité du garagiste ne s’arrête pas là. En cas d’accident de la route, si le client parvient à prouver un lien de causalité entre cet accident et la pose de pneus non conformes, l’atelier pourrait avoir à fournir une compensation pour les dommages encourus.
« Le mécanicien qui pose volontairement des pneus en sachant qu’ils ne sont pas conformes devient responsable des préjudices et de tout ce qui pourrait découler comme dommages que le client parviendra à attribuer à l’installation de ces pneus », explique Me Lacombe.
Un devoir d’expert
Luc Brochu, propriétaire de Pneus et Mécanique Wellington, à Sherbrooke, a reçu en atelier, ce printemps, des pneus retravaillés illégalement au couteau, qui n’ont évidemment pas repris la route. Mais selon lui, même si les pneus sont conformes, le technicien est responsable de voir à ce qu’ils soient sécuritaires.
« Même si le pneu est conforme, on peut poser des questions au client. S’il travaille sur la route toute la semaine et que la barre d’usure du pneu est presque disparue, on l’encourage fortement à s’en procurer d’autres, affirme M. Brochu. Ces pneus pourraient mettre des vies en danger ou, du moins, nuire à votre réputation : un pneu qui éclate un mois après l’installation, ce n’est pas une bonne publicité pour votre atelier ! »
Ainsi, dans ce cas précis, le client n’est pas maître et n’a aucun recours pour imposer au mécanicien de poser des pneus que ce dernier juge inadéquats. « Il n’existe aucun lien de subordination entre le client et son mécanicien, souligne Me Lacombe. Ce dernier se doit d’user de son jugement dans l’exécution de son travail. » Après tout, l’expert, c’est le garagiste, et son jugement pourrait sauver des vies.